le refuge 8

Publié le par paul geister

Le quatuor écoutait la diatribe du conservateur tout en admirant les riches décorations du palais livresque. Des mosaïques, des fresques alourdissaient les tapisseries au-dessus des marqueteries. De riches tentures et de somptueuses draperies renforçaient encore le côté luxueux de la salle. Les motifs s’inspiraient de figures bibliques. Là c’était une allégorie des cinq livres : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome. Ici, les livres poétiques et sapientiaux : livre de Job, les Psaumes, les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique des cantiques, le livre de la Sagesse, l’Ecclésiastique.

A chaque livre correspondaient des métaphores. Sur les proverbes certains esprits osés s’étaient permis des remarques libres :

-         Tant va la cruche à l’eau qu’elle casse ou que le potier a raté son tour.

-         L’habit ne fait pas le moine ni le sacrement

-         Honni soit qui manigance

Qui vole un bœuf est très musclé ! Suivait une flopée de concept sur les superstitions :

-         Si le pain est retourné la boulangère tombe enceinte… sauf si c’est un pain industriel.

-         Passer sous une échelle porte malheur, sous un pont aussi, et sous une voiture encore plus.

-         Il est malheureux qu’un chat noir croise notre chemin, surtout si nous l’écrasons.

A peine nos amis eurent le temps de déchiffrer les blagues et autres remarques humoristiques qu’un assistant annonça le débarquement des troupes de Sargo. Le temps de la rigolade était fini. Le conservateur en chef fit sonner l’alerte.

Il indiqua aux quatre héros une petite porte dérobée :

-         Cette porte mène à la crypte. Si vous voulez tenter votre chance. Il est préférable que vous vous empariez du livre sacré avant Sargo. Je pense qu’avec vous il sera en de meilleures mains. On me fait dire que Sargo vient dans le but de me donner une subvention pour agrandir l’annexe de la rue de la Portettaz. Je n’y crois guère.

Les aventuriers s’y engouffrèrent aussitôt. Steven désira faire une courte halte en passant devant une cave pleine de bons vins mais Camille l’en empêcha. Finalement, après de longues volées de marches étroites, ils débouchèrent devant un reste d’église romane de style clunisien et le prieuré attenant. On devinait ensuite les restes du vieux bourg d’architecture italienne, datant du XVIe dont les rues disparaissaient ensuite sous les soubassements et les fondations nouvelles de l’ancien village du livre.

-         Regardez, le parvis est encore intact.

Sur le tympan on devinait une scène allégorique simple. Mais la pierre usée par le temps en avait perdu le cachet. Ils passèrent sous le tympan, franchirent le porche. La crypte se trouvait à proximité de l’absidiole. Les conservateurs en avaient libéré l’entrée laissant de gros gravats dans les transepts. Enfin, ils descendirent dans les fondations pieuses, lorsqu’une voix profonde et autoritaire les arrêta.

-         Qui que vous soyez, vous ne pourrez jamais vous emparer de mon précieux trésor.

Ils découvrirent sous l’injonction de la voix, un être dégingandé, noir, dont les traits lunaires, grimaçants, n’engageaient à rien de bon. Il s’appuyait sur une statue de chevreuil bondissant, le livre sacré trônant à ses côtés au milieu de la crypte.

Ils dégainèrent leurs armes respectives. Le spectre longiligne, dont une aura maléfique baignait toute la pièce s’exprima à nouveau :

-         Préparez-vous à m’affronter !

Publié dans jeux d'écriture

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